Voici la problématique et la récension des écrits du projet de recherche sur lequel je travaille actuellement pour l’obtention de mon doctorat. (Veuillez noter qu’aucun matériel provenant de mes consultations dans mon bureau ne pourra être utilisé pour préserver l’anonymat de mes clients et m’assurer de la plus grande objectivité possible dans cette recherche)
L’attribution de sens dans le phénomène de coïncidences significatives en psychothérapie
PROBLÉMATIQUE
Tout au long de la vie, et particulièrement dans l’expérience de la psychothérapie, la recherche de sens constitue un besoin complexe, vital et essentiel à satisfaire. Comme tous les besoins, il aurait une fonction adaptative tant pour l’individu que pour les collectivités qui tentent de le réguler (Panksepp, 2019). Or ce qui est adaptatif, satisfaisant et signifiant pour soi à l’échelle personnelle peut aller à l’encontre de ce qui est adaptatif, satisfaisant et signifiant pour l’autre à l’échelle collective et vice et versa comme l’a souligné le neuroscientifique Sébastien Bohler dans son livre Où est le sens ? (Bohler, 2023).
De surcroit, la dérégulation du besoin de sens peut conduire à des états dépressifs qui poussent les individus et collectivités qui en souffrent vers des comportements irrationnels, voir même suicidaires comme l’ont soutenu plusieurs auteurs notamment (Jung, 1973) et (Frankl. 1988)
Ce serait lors de crises comme celle que nous avons vécues collectivement avec la pandémie en 2019 ou lorsque nous vivons personnellement des crises, événements et rencontres inattendues dont nous ignorons les causes et qui échappent à notre contrôle et nos prévisions que notre besoin de sens serait le plus sollicité dans notre cerveau (Bohler, 2023). C’est d’ailleurs la définition que donne le philosophe et mathématicien Antoine Augustin Cournot du hasard: « La coïncidence de deux ou plusieurs séries causales indépendantes qui échappent aux lois de la probabilité et à notre capacité d’en trouver les causes » (Sentis 2005). Les coïncidences significatives (CS) s’inscrivent dans cette catégorie et ont été étudiés initialement dans les années cinquante dans le contexte de la psychothérapie par le psychiatre suisse Carl Gustav Jung et le prix Nobel de Physique Wolfgang Pauli sous le concept de « synchronicité » (Jung, 1952). De façon concise, Jung définit la synchronicité comme une coïncidence chargée de sens de nature acausale, c’est-à-dire sans liens de causalité (Jung, 1952). Plus précisément, il décrit le phénomène de synchronicité par l’apparition simultanée d’un certain état psychique avec un ou plusieurs événements externes qui apparaissent comme des parallèles significatifs à l’état subjectif momentané (Jung, 1952).
L’exemple du scarabée chez une patiente de Jung résistante au traitement offre un exemple typique du phénomène de coïncidences significatives (CS) dans le processus de psychothérapie. Une patiente qui se trouvait dans une impasse thérapeutique et une transition de vie difficile fait un rêve dans lequel elle reçoit un scarabée doré. En racontant son rêve à Jung le lendemain dans le bureau de thérapie, un scarabée doré se cogne contre la fenêtre. Jung se lève pour ouvrir la fenêtre et le faire entrer dans l’espace thérapeutique et la patiente, fortement déstabilisée, s’ouvre au traitement et sa vie se transforme positivement.
D’où provient le sens de ce phénomène ? Comment comprendre l’attribution de sens dans cet exemple entre Jung et sa patiente ? Est-ce Jung qui « impose » son sens à la patiente, celle-ci vivant une transition de vie et étant alors plus vulnérable et perméable aux suggestions de son thérapeute ? Est-ce que des psychologues d’autres approches auraient réagi de façon similaire ? Est-ce que cette coïncidence aurait eu le même impact si le sens des événements avait été inversé à savoir si la patiente avait d’abord aperçu un scarabée dans le bureau de Jung puis rêvé ensuite de ce symbole ?
Personne d’autre que Jung et la patiente peuvent répondre à cette question. Le phénomène de synchronicité est très complexe et très peu de recherches empiriques ont été effectuées dans le corpus scientifique à ce jour (Roesler, C., & Reefschläger, G. I. (2022).
J’étudie ce phénomène depuis plus de 25 ans dans le domaine des rencontres qui nous transforment et j’ai publié un livre de psychologie populaire en 2001 sur le sujet. J’ai proposé dans Les Hasards Nécessaires (Vézina 2001) un ensemble de critères pour les reconnaitre, mais je ne disposais et nous ne disposons toujours pas à ce jour de données empiriques suffisantes et convaincantes pour vérifier ces affirmations, ce qui motive la présente recherche.
RÉCENSION DES ÉCRITS
En neuroscience, le sens est décrit comme la capacité du cerveau à prédire ce qui va arriver (Bohler, 2023). Cette capacité aurait procuré un avantage évolutif indéniable chez les humains. « Lorsqu’un être vivant est capable de prédire ce qui va arriver à partir de ce qu’il observe autour de lui, il décuple son pouvoir de contrôle et de décision. Il peut rechercher les situations les plus avantageuses et fuir celles qui sont potentiellement dangereuses. Il a un temps d’avance sur le réel. La prédiction donne le contrôle. » (Bohler, 2023, p.22).
Le besoin de sens proviendrait de la structure du cerveau appelée le cortex cingulaire antérieur. Selon Bohler (Bohler 2023) le rôle du cortex cingulaire antérieur serait de prévoir ce qui risque d’arriver et serait activé en cas d’erreur de prédication.
Le besoin de sens serait intimement lié à la conscience chez l’humain. Mark Solms, (Solms, 2022) va dans le même sens que Bohler en indiquant que notre cerveau serait constamment en train de réduire au maximum le chaos et l’imprévu afin de créer un ordre relatif qui nous permet de nous adapter et prédire les phénomènes que nous rencontrons dans le monde. Solms pose l’hypothèse que la structure physiologique responsable « d’allumer » la conscience, principal allié de régulation de notre besoin de sens, serait une structure qui se trouverait dans les zones très anciennes du cerveau au niveau de la formation réticulée et non dans les couches plus récentes du cerveau comme dans le néo cortex.
D’un point de vue énergétique, le cerveau, tenterait de réduire au maximum l’entropie dans son environnement interne et externe au moyen du « thermostat » de la « conscience » et des émotions selon le principe d’homéostasie. Le rôle de la conscience serait alors de limiter au maximum le chaos et l’incertitude (Solms, 2022), mécanisme appuyé par le cortex singulaire antérieur, (Bohler 2023) mais dépenserait beaucoup d’énergie pour y arriver.
Or si le cerveau qui “pilote” notre conscience est occupé à limiter le chaos et réduire la complexité au maximum, si notre cerveau est conditionné à chercher un ordre et une « agentivité » qui correspond qu’à ce qu’il connait, ce qu’il contrôle et ce qui le rassure, comment la nouveauté peut-elle entrer dans le champ de notre conscience ?
En physique fondamentale, l’émergence spontanée de nouveauté serait issue non pas des lois causales et probabilistes du hasard classique mais de « l’aléa du monde quantique » (Connes, dans (Vézina 2020). Favoriser la nouveauté naturellement et spontanément dans la nature et dans notre conscience pourrait être alors l’un des rôles clés des coïncidences significatives de nature « a causales » afin de favoriser nos facultés d’adaptations tant aux échelles personnelles que collectives ce qui est corroboré par l’un des physiciens les plus sérieux et rigoureux dans le domaine, David Peat (Peat, 2000).
Selon Peat (Peat, 2000), la synchronicité créerait une sorte de pont entre la matière objective et l’esprit subjectif pour favoriser notre adaptation face au chaos. Cette proposition va aussi dans le sens de ce que son collègue et proche contemporain d’Einstein, David Bohm nomme « l’ordre impliqué » et « l’ordre déployé ». Le phénomène de synchronicité ferait entrer de la nouveauté, émergeant de l’aléa quantique d’un ordre impliqué inaccessible à nos instruments et mesures objectives. Comme le proposait le responsable de la traduction des livres de Jung, Michel Cazenave, dans un livre sur le sujet écrit notamment avec le physicien Hubert Reeves (Cazenave et all 1995), le phénomène de coïncidences significatives présenterait une incursion du monde « A causal » qui déstabiliserait la conscience du sujet au point d’attirer notre attention sur les opportunités et les nécessités de changer quelque chose et de mieux nous adapter à notre environnement.
SYNCHRONOCITÉ, CRÉATIVITÉ ET RÉGULATION DES ÉMOTIONS
Cette propriété créative de la synchronicité est corroborée par la psychologue Terry Marks Harlow (Marks-Tarlow, 2020) qui a étudié les liens entre les systèmes complexes décrits par la théorie du chaos et la synchronicité. J’ai aussi exploré cette hypothèse des propriétés créatives et adaptatives de la synchronicité dans la nature et la psyché en lien avec les travaux du mathématicien Alain Cônes sur l’aléa quantique dans un article sur le sujet (Vézina, 2020). La synchronicité génèrerait un effet émotionnel de surprise chez le sujet qui traduirait la présence d’une très grande charge émotionnelle et d’une nécessité d’attention de la conscience du sujet en vue de son adaptation.
Le rôle homéostatique des émotions dans la régulation des besoins dont particulièrement le besoin de sens est corroboré par les recherches de Panksepp (Panksepp, 2019). Ses recherches qui font office de référence dans le domaine ont pu démontrer le rôle central des émotions dans la satisfaction des besoins chez les humains, en particulier pour le besoin de sens qui mettrait en scène les systèmes « Seek » and « Play » (Panksepp, 2019).
Nous oscillons alors perpétuellement entre l’ordre et le chaos, entre le désir de contrôler les choses qui ne nous conviennent pas dans notre environnement et la nécessité de nous adapter au chaos du monde afin d’épouser les changements qui échappent à notre contrôle.
Sur quoi nous portons notre attention lorsque le chaos survient et que nous faisons l’expériences de rencontres inattendues qui semblent déjouer les lois du hasard ? Qu’est-ce qui nous fait dépenser le plus d’énergie attentionnelle lorsque nous ne pouvons contrôler ce qui arrive ?
Le mécanisme de « l’agentivité » nous éclaire aussi sur les mécanismes d’attribution de sens chez les humains qui oscillent continuellement entre besoin de sécurité et recherche de nouveauté pour s’adapter. Le cerveau humain serait expert dans la détection d’agent, ce que le psychologue Justin Barret a nommé le détecteur d’agentivité hyperactif (DAH), (Barrett 2011).
De façon générale, la détection d’agent est la tendance des humains à présumer l’intervention réfléchie d’un « agent conscient ou intelligent » dans des situations qui peuvent ou non en impliquer. Les cerveaux les plus complexes comme celui des humains permettent de créer des comportements hautement élaborés de collaboration qui nécessitent d’être capable de comprendre les intentions des autres afin d’anticiper les dangers et les actions les plus optimales. En tant qu’humains, nous pouvons communiquer via un langage articulé, et avons accès à un champs de symboles très riche. Notre cerveau excelle à interpréter les intentions et toutes les formes d’actions dans notre environnement qui relèvent d’un projet, d’une volonté, c’est-à-dire les résultats de la présence d’un « agent ».
Pour l’humain, le principal danger, mais aussi, paradoxalement, la principale ressource aussi, sont les autres humains. En matière d’énergie attentionnelle, ce qui doit être détecté avant tout, et ne jamais rester inconnu, est donc la présence d’une intention « humaine » derrière le chaos, les bruits, les mouvements, les objets qui nous entourent. Ceux qui ont perdu à ce jeu n’ont pas laissé de descendant, les autres sont nos ancêtres ; ils nous ont légué leurs gènes. Naturellement, nous « voyons » donc de l’humain partout ce qui peut activer un état de vigilance paranoïaque. Nous donnons du sens à des choses qui n’en ont pas, nous voyons des connexions dans la course aléatoire des événements (une disposition qu’on appelle apophénie), sous-estimant la puissance organisatrice du hasard et des aléas du quantique.
En psychiatrie, une apophénie est une altération de la perception qui conduit un individu à attribuer un sens particulier à des événements banals en établissant des rapports non motivés entre les choses. Tout lui paraît avoir été préparé pour lui : par exemple pour le tester, pour lui transmettre un enseignement caché etc.
PATHOLOGIE DU SENS
Nous voyons donc que l’un des principaux problèmes de l’étude des coïncidences significatives est l’attribution de sens qui peut soit favoriser la créativité et l’adaptation ou nous réconforter dans nos croyances limitantes et déréguler notre besoin de sens dans des délires paranoïaques.
Jung lui-même, tout comme Marie Louise Von Franz et Michel Cazenave et même l’astrophysicien Hubert Reeves ont mis en garde les chercheurs de synchronicités sur les risques de basculer dans la paranoïa dans un ouvrage collectif sur le sujet. (Cazenave et all, 1995)
Il y aurait une population d’individus qui manifestent une propension à surinterpréter les actes et les paroles, à suspecter complots et conflits d’intérêts, à attribuer des intentions à leurs contradicteurs, voire qui prétendent connaître les vraies motivations d’autrui. Les facteurs favorisants l’attribution de sens adaptatifs devront être identifiés dans la présente recherche pour enrichir nos connaissances sur les mécanismes d’attributions de sens dans le phénomène des CS.
ACTIVATION ARCHETYPALE
Si on aborde l’attribution de sens des coïncidences significatives dans le processus de psychothérapie. Plus spécifiquement, l’Ordre des psychologues du Québec (2024) définit la psychothérapie comme « Un traitement psychologique. Elle vise à provoquer des changements d’attitudes, de comportements, de manières de penser ou de réagir chez une personne, afin de lui permettre de mieux se sentir, de trouver des réponses à ses questions, de résoudre des problèmes, de faire des choix, de mieux se comprendre ». Comment distinguer les coïncidences signifiantes qui enrichissent ce processus de ceux qui renforcent les défenses du patient ou encouragent la superstition et ou la pathologie du sens ?
La plupart des auteurs qui étudient le sujet s’entendent pour identifier la présence d’émotions intenses lors de CS et le facteur de transformation signifiantes dans la vie de l’individu (Beitman 2022), (Hopcke 2009) (Hogenson 2009) comme critères essentiels de la synchronicité. Ces deux critères sont assez centraux pour démarquer les coïncidences banales de celles qui entrent dans le phénomène de synchronicité tel que rapporté initialement par Jung et que nous tenterons de détecter dans notre échantillon de CS.
Jung (Jung 1952) souligne que l’intensité émotionnelle lors de ce phénomène indiquerait l’activation d’archétypes dont le patient doit prendre conscience en psychothérapie pour composer avec le monde et l’inconscient. Jung a mis en évidence la nature des archétypes en tant que facteurs formels responsables de l’organisation des processus psychiques inconscients : ce seraient des « modèles de comportement. En même temps, ils ont une charge et un spectre spécifique et développent des effets « numineux » qui s’expriment sous forme d’affects » (Jung, 1952) Selon Jung, il existerait des formes innées d’intuitions, à savoir les archétypes qui influencent la perception et la compréhension du monde, qui seraient les déterminants a priori nécessaires de tous les processus psychiques. Tout comme ses instincts obligent l’homme à adopter un mode d’existence spécifiquement humain, de même les archétypes contraignent ses perceptions pour suivre des modèles spécifiquement humains. (Jung, 1919)
L’activation archétypale dans le phénomène de coïncidence significative pourrait être compris à la lumière du concept de « densité symbolique » proposé par Hogenson qui y voit alors un lien avec l’activation des archétypes lors de synchronicité (Hogenson, 2009).
Azziz (Azziz, 1990) va dans le même sens et pourrait nous servir de repères dans la collecte de données pour détecter la présence d’authentiques coïncidences significatives Ainsi, est-ce que les coïncidences significatives présentent :
- Un sens parallèle (les évènements tombent en même temps, ce sont des coïncidences qui défient les probabilités, mais ne génèrent pas d’émotions ou de sens particuliers)
- Des évènements qui “tombent” en même temps avec une charge émotionnelle très importante
- Des évènements qui “tombent” en même temps et transforment quelque chose dans la vie de l’individu.
- Des évènements ont une portée archétypale objective et l’émotion tout comme le changement ne s’observent pas seulement pour une personne, mais aussi à travers une « vague de sens » affectant l’environnement du sujet et toutes les personnes impliquées, dans le cas de notre étude, la personne même du psychothérapeute qui enrichit son intervention au contact de la ou des coïncidences signifiantes (CS).
Pour notre étude, nous auront à choisir le terme exact pour désigner le phénomène à étudier. Dans la longue correspondance entre Jung et le physicien et prix Nobel Wolfgang Pauli qui a conduit à développer ce concept en parallèle avec la physique quantique, Pauli propose que les phénomènes synchronistiques, n’étant pas nécessairement « synchrones » (au sens de « simultanés »), la synchronicité serait un terme quelque peu trompeur. Pour cette raison, Pauli a préféré parler de ‘correspondances significatives’ sous l’influence d’un agent et ou d’un « agencement acausal » archétypique. Nous opterons pour le terme de « coïncidences significatives » (CS) qui fait plus consensus pour la présente recherche et qui nous permettra aussi de ne pas nous enfermer que dans l’approche jungienne pour l’étudier.
Nous aurons aussi à décider si nous étudions les coïncidences dans le cadre de la psychothérapie uniquement ou en dehors de la psychothérapie. Hopcke (2009) distingue les coïncidences dans l’espace de la psychothérapie de celles qui sont vécues en dehors de la thérapie en privilégiant les premières parce qu’elles s’approchent le plus de celle qu’a vécu Jung avec l’exemple du scarabée et délimite l’observation dans les mesures du possible.
Nous privilégierons les coïncidences vécues dans le processus de psychothérapie en mettant l’accent sur la co-construction de sens entre le psychothérapeute et le patient qui en fait l’expérience pour tenter d’atteindre une certaine indépendance de sens et pour chercher des invariants qui ne seront pas seulement attribuables à l’état de vulnérabilité du patient, à l’imposition d’un sens par le psychothérapeute et ou à une approche théorique spécifique.
COINCIDENCES SIGNIFICATIVES ET PSYCHOTHÉRAPIE GESTALTISTE DES RELATIONS D’OBJETS
Comme mentionné précédemment, la régulation émotionnelle est au cœur du processus de psychothérapie, peu importe l’approche théorique. De plus, l’intensité émotionnelle est l’une des caractéristiques essentielles de la coïncidence significative. En Psychothérapie Gestaltiste des relations d’objets (PGRO, cette régulation affective est favorisée par la relation thérapeutique crée en champs 1 et en champs 2 (Delisle et Girard, 2012). Le champs 1 inclut tout ce qui se passe ici et maintenant entre le psychothérapeute et son client et le champs 2, toute l’histoire relationnelle entre les deux individus qui activent des patterns relationnels à identifier pour favoriser une meilleure adaptation du patient. C’est en observant ce qui se passe dans ces 2 champs que nous serons susceptibles de découvrir des enchevêtrements de coïncidences qui seront déclenchées par l’intensité émotionnelle du processus de psychothérapie et l’histoire vécue par le patient avec son psychothérapeute. En PGRO, il y a nécessité de vivre les 3 R à savoir la répétition, la reconnaissance et la réparation des patterns non adaptatifs.
Complémentairement à l’intégration de la charge émotionnelle et symbolique des archétypes qui sont des patterns que nous devons détecter comme le propose l’approche jungienne, la détection des patterns qui se répètent, se reconnaissent et se transforment par des coïncidences signifiantes dans le champ relationnel crée entre le psychologue et son patient proposée par l’approche de la PGRO pourra fournir un matériel complémentaire d’étude à une recherche uniquement jungienne.
RECHERCHES EMPIRIQUES SUR LES COINCIDENCES SIGNIFIFIANTES EN PSYCHOTHÉRAPIE
La revue de littérature montre que l’étude empirique des coïncidences significatives sont très rares. La plupart des livres et articles se concentrent sur des hypothèses et points de vue théoriques sur le phénomène. Nous allons nous inspirer de deux études qualitatives récentes pour bâtir notre devis de recherches. D’abord l’étude de Roesler, C., & Reefschläger, G. I. (2022) qui visait à identifier comment la synchronicité peut enrichir le processus de psychothérapie. Sur un échantillon de 46 thérapeutes, 42 ont rapportés des expériences de synchronicités signifiantes pour eux et leurs patients. La limite principale de cette recherche qualitative est qu’elle a été effectuée seulement sur des thérapeutes jungiens. Elle a par ailleurs mis en lumière l’apport de la fonction transcendante qui est la fonction intégratrice des archétypes dans le processus de psychothérapie.
L’autre recherche qualitative dont nous allons nous inspirer est celle de Elizabeth C. Roxburgh, Sophie Ridgway & Chris A. Roe (2015) Les auteurs ont réalisé une recherche phénoménologique sur la synchronicité en thérapie avec des thérapeutes de plusieurs orientations théoriques. Cinq des participants étaient des femmes et quatre des hommes, âgés de 39 à 64 ans et dont la durée de pratique variait entre 5 et 22 ans. Les résultats de cette recherche suggèrent que les coïncidences significatives (CS) peuvent servir à renforcer la relation thérapeutique dans la mesure où les participants ressentent un plus grand sentiment de connexion avec les clients. Les participants ont également perçu les CS comme des précurseurs utiles d’informations sur le processus thérapeutique, et comme un moyen de surmonter les difficultés de communication entre le client et le thérapeute qui transcendent alors la dimension uniquement verbale de la thérapie pour offrir une représentation symbolique plus riche et plus complète intégrant tant le rationnel que l’émotionnel.
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Attribution du sens dans le phénomene de synchronicité (PDF Depot initial 8 janvier 2024)